De B à W… Récit d’une participation au Livre Inter

On m’a souvent demandé comment j’avais réalisé ce rêve d’être juré au Livre Inter… Voici donc le récit d’une aventure encore très présente aujourd’hui !

D’abord,

Il faut oser. Se dire qu’après tout on a une chance, que l’on peut devenir l’un des vingt-quatre sélectionnés. Que ce rêve plusieurs fois fait de participer au Livre Inter peut devenir réalité. Avoir la faveur de lire dix romans à la suite, le devoir de défendre sincèrement ceux qui vous auront plu, de critiquer les autres, le droit de vivre ces instants que vous imaginez magiques, sans trop réaliser vraiment ce qu’ils peuvent être.

Ensuite,

Il faut écrire… prendre sa plus belle plume et livrer une partie de soi, avec sincérité, honnêteté, parler de cette passion qui vous tient : la lecture… Difficile de savoir ce qui fera pencher la balance de votre côté, ce qui vous démarquera.

Puis,

Il faut aller jusqu’au bout de la démarche et envoyer cette missive. Cette étape semble la plus facile… Mais peser l’enveloppe, la timbrer et la glisser dans une boite aux lettres peut devenir un effort surhumain quand on évalue le poids de la déception si on est écarté… Et puis le faible espoir qui vous habite finit par prendre le dessus… « Advienne que pourra ! »

Après,

Il faut attendre, sans vraiment savoir combien de temps. Un jour vous allumez la radio, plus ou moins par hasard, comme tous les jours ou presque, et commence alors l’énumération des jurés du Livre Inter : douze femmes, douze hommes. Après une litanie qui vous parait interminable, vous commencez à ne plus y croire… quand votre nom, votre âge, votre ville, votre profession sont annoncés… Les hasards de l’ordre alphabétique ont fait que vous étiez la dernière. Vous avez du mal à y croire, pensez avoir rêvé… Heureusement, vous n’étiez pas la seule à écouter, on vous appelle pour vous féliciter, vous commencez à réaliser !

Lire la suite

Publicité

1Q84

d’Haruki Murakami

1Q84_Livre-1pChronique de l’année 1984 – référence au roman de George Orwell – où Aomamé et Tengo, les deux protagonistes du roman, expérimentent une réalité déformée.

L’une professeur d’art martiaux et thérapeute, l’autre professeur de mathématiques et romancier ignoré, ils mènent des vies solitaires jusqu’au jour où ils glissent chacun leur tour dans une réalité parallèle que Aomamé nomme 1Q84.

Pour Tengo ce sera la rencontre avec le manuscrit de Fukaéri, une superbe jeune fille de 17 ans dont il va prendre secrètement en charge la réécriture. Son univers va alors se transformer subrepticement… Pour Aomamé c’est la descente d’un escalier interdit…

Alors qu’ils se sont croisés enfants à l’école souffrant l’un et l’autre d’une histoire familiale oppressante, ils se perdent de vue et évoluent chacun de leur coté avec pourtant toujours en mémoire la petite fille ou le jeune garçon de 10 ans dont les mains se sont serrées un jour. Dès les premières lignes le décor est posé et l’intrigue vous saisit. On se laisse captiver par ces deux histoires parallèles, ou presque puisqu’elles finiront par se recroiser. Tous deux dans la maîtrise de leur destin, de leur corps et de leur pensée, leur morale désintéressée nous séduit dans un monde où la violence règne.

L’écriture d’Haruki Murakami est limpide, nourrie par des phrases précises où les détails sont toujours essentiels. Ces nombreuses références, qu’elles soient littéraires où musicales ne sont jamais gratuites mais révèlent la complexité des personnages et de leur vie intérieure, de leurs interrogations. Il décortique l’âme humaine et nous emporte dans ce voyage, parfois loufoque. A la limite du surréalisme, il en émane une poésie incroyable issue des images présentées d’une banalité quotidienne. Chaque personnage nous est rendu attachant, même l’affreux Ushikawa qui apparait dans le troisième livre. A la fois fantastique et incroyablement réel, ce récit onirique nous dépayse totalement, nous entrainant dans la magie de ces phénomènes inexplicables tout droit sortis de conte de fée. Les little people sorte d’elfes insaisissables jusqu’au bout restent un mystère, et on ne sait avec certitude s’ils sont bénéfiques ou maléfiques.

La lecture de ce roman fait partie de mes voyages de l’été… je me suis laissée porter par sa magie, me laissant simplement conter cette histoire à la limite du réel et de l’imaginaire où les personnages sont magistralement façonnés et incroyablement attachants ! Après avoir lu ce roman d’Haruki Murakami vous ne regarderez plus jamais la lune comme avant…

Profanes

profanesde Jeanne Bennameur

Il est des livres qui dès la première phrase vous enveloppent, vous emmènent ailleurs… Si loin, et pourtant si proche de tout ce que vous avez déjà vécu. Une sorte de voyage intérieur, un émerveillement à chaque page tournée, à chaque mot déchiffré, placé là avec évidence.

Les livres de Jeanne Bennameur ont tous sur moi ce pouvoir. Des histoires simples, et pourtant complexes en même temps, des vies vécues.

Profanes a cette magie. Cinq vies, qui comme beaucoup, ont côtoyé la mort, à un moment ou à un autre, cinq vies qui se rassemblent par le choix de l’une d’elle, cinq vies qui trouvent refuge dans une grande maison au jardin merveilleux, où se tissent des liens invisibles et puissants qui vont aidé chacun à se réconcilier avec sa vie, avec les morts qui la jalonnent…

Un vrai coup de cœur, lisez-le !

La Déesse des petites victoires

la DéesseYannick Grannec

 

« Si les gens ne croient pas que les mathématiques sont simples, c’est uniquement parce qu’ils ne réalisent pas à quel point la vie est compliquée »

John von Neumann

mathématicien et physicien

Histoires croisées de deux femmes, côtoyant, aimant et supportant des hommes à l’intelligence mathématique. Echange de souvenirs, de ses petits moments de vie qui finalement sont la base tangible de ces « génies » qui sans ces femmes aimantes à leurs côtés, n’aurait pu accomplir leurs travaux.

Récit en filigrane de la vie de Kurt Göbel, mathématicien du XX° siècle, peu connu des profanes, et qui ne savait pas vivre, terrorisé par le monde de ces semblables, paranoïaque et inadapté aux relations sociales. Récit surtout de sa femme Adèle, qui ne savait qu’aimer, et qui porta toute sa vie le corps de ce génie fragile… Récit aussi d’Anna, jeune femme effacée par une mère omnipotente et un amour finalement semblable à celui d’Adèle mais qu’elle fuit pour se protéger. Tous ces récits croisés sur fond de ce XX° siècle fascinant et terrifiant à la fois, qui vit la découverte de l’énergie atomique et les ravages d’Hitler.

Ce roman, formidablement écrit et documenté, est une ode au génie humain mais surtout à l’amour sans qui il ne serait rien…

« Tout ce que j’aurai fait pour lui dans ma vie. Ranger le monde pour empêcher cette maudite entropie de l’engloutir. Toutes les femmes ont-elles le même destin ? S’appareiller, par amour ou par besoin de sécurité, pour finir par tenir à bout de bras celui qui était censé être le rocher. Est-ce notre lot à toutes ? Ces frères, ces pères, ces amants, amis, sommes-nous là pour les repêcher ? Est-ce dans ce but loufoque que Dieu nous a donné des seins ou des hanches ? Sommes-nous seulement des bouées ? Que nous reste-t-il après, quand il n’y a plus personne à sauver ?

Ranger les souvenirs. »

Les désorientés

d’Amin Maalouf

Les désorientésUn coup de téléphone peut faire chavirer une vie… Le personnage central de ce roman cède à la requête d’un « ancien » ami qui l’appelle à son chevet, l’obligeant pour cela à un retour au pays, quitté dans l’agitation d’une guerre à laquelle il ne voulait pas participer. Bien des années plus tard, ce retour au source de leur amitié le pousse à avoir un regard lucide sur leur groupe d’amis qui rêvait d’un monde meilleur et qui s’est pourtant dispersé, brouillé, perdu de vue. A travers cette quête des souvenirs, du passé, il se rend compte du lien qui les unissait et veut reformer, pour quelques heures au moins, leur petite assemblée. Chaque membre du groupe a cependant pris son chemin, a fait ses choix, vis à vis du pouvoir, de l’argent et de la foi, que ce soit le richissime entrepreneur ou celui qui a tout abandonné pour vivre dans un monastère perdu de la montagne, que ce soit le fanatique ou celui qui tolère chaque religion, vont-ils pouvoir recréer l’intimité jadis si forte ? Regard nostalgique sur un monde qui n’est plus, qui disparait peu à peu chaque jour, sur un pays qu’il aime malgré tout, malgré les affrontements récurrents, malgré la coexistence des religions, malgré le télescopage des traditions et des cultures !

Lire la suite

Un peu de bois et d’acier

CHABOUTE

ChaboutéEt énormément de poésie ! Entourée de bédéphile, le moins que l’on puisse dire est que je ne suis pas une grande lectrice de ce genre d’ouvrage… Et pourtant, il arrive que l’on y fasse des rencontres hors du commun. Dans ce monde de bulle, j’ai eu un vrai coup de foudre pour cet auteur qui n’en met aucune !

A l’aide de son crayon et de sa plume, il révèle par une succession de dessin, simple en apparence, un panel d’émotion incroyable. Un peu de bois et d’acier, c’est l’histoire d’un banc public, où tout un chacun peut venir faire une pause, depuis les deux adolescents venus graver leur amour dans le bois jusqu’à cette dame qui lit, de ce couple âgé qui jour après jour vient y partager un gâteau au jeune garçon qui s’en sert de rampe de skate… Chacun l’utilise à sa manière, son rythme, selon ses besoins, du policier qui le surveille jusqu’à l’employé municipal qui l’entretien avec délicatesse.

Un lieu de rencontre, « un répit, un instant, une pause…un abri, un havre, un refuge…une scène…un carrefour…juste un peu de bois et d’acier » comme le décrit l’éditeur. Un réceptacle d’histoires et de sentiments, un lieu de mémoire auquel on s’attache jusqu’à le racheter à un brocanteur !

Histoire simple sans parole, qui sollicite notre imagination et nous laisse finalement attaché et ému par un peu de bois et d’acier !

Le cœur cousu

de carole Martinez

 

Certains livres se méritent. Leur lecture demande une certaine patience. Ils imposent un rythme, une progression pas à pas, tellement l’intensité du récit est forte. Ce roman, où le merveilleux prend souvent le pas sur la réalité, en fait parti.

Ce conte, entre magie et sorcellerie, entre vie et mort, entre lumière et ténèbres, entre Dieu et le Diable, entre richesse et pauvreté, est fait de contrastes… La mesquinerie et la jalousie y ont leur place, l’amour et la générosité aussi, la folie avant tout.

Lire la suite

Ce que je sais de Vera Candida…

de Véronique OVALDE.

Pas plus que ce qu’en révèle ce livre d’une écriture envoutante !

On imagine une île au large de l’Amérique du sud, un port de l’autre côté… Des paysages à peine décrit et pourtant des images qui s’imposent. Des femmes, mères et filles, n’ayant pas choisi ces maternités et pourtant tellement aimantes et attachées à leur progéniture. Des destins d’héroïnes dans des vies simples, où liberté et mélancolie se mêlent, ou l’amour arrive enfin quand Vera Candida brise la fatalité et fuit l’île…

Lire la suite

Journal d’un corps

de Daniel Pennac

Comment résister à la sortie d’un « Pennac » ? Président du jury lorsque j’ai été jurée du livre Inter, j’ai une tendresse particulière pour cet auteur dont j’ai lu tous les livres… Souvent léger et distrayant, parfois rempli de vérité, aucun ne m’a séduit comme ce dernier…

Quelle prouesse que ce livre ! Le journal qu’un homme tient de son corps, de 12 ans et quelques, à 87 ans, heure de son agonie. Cadeau posthume à sa fille adorée, où il lui transmet toute son humanité, toutes les surprises que lui a procuré son corps, tous les défis qu’ils se sont mutuellement lancés.

Lire la suite

City

d’Alessandro Barricco

J’ai emprunté ce livre parce que son titre m’a attirée… City… promesse d’un livre urbain ? J’ai parcouru la quatrième de couverture (qui en fait se situe à l’intérieur du livre…) et la description que fait l’auteur de son ouvrage dans lequel il précise avoir voyagé pendant trois ans m’a conforté dans cette envie !

J’ai aimé ce livre fait d’impasses, de petites ruelles et d’avenues, j’ai aimé ces histoires parallèles qui font des quartiers de plus en plus attachants au fur et à mesure que l’on s’y promène. Ville complexe aux histoires parallèles, typées, aux personnages complexes mais sympathiques, ville labyrinthique où on ne comprend pas tout, où on se perd pour mieux se retrouver…

Lire la suite