Profanes

profanesde Jeanne Bennameur

Il est des livres qui dès la première phrase vous enveloppent, vous emmènent ailleurs… Si loin, et pourtant si proche de tout ce que vous avez déjà vécu. Une sorte de voyage intérieur, un émerveillement à chaque page tournée, à chaque mot déchiffré, placé là avec évidence.

Les livres de Jeanne Bennameur ont tous sur moi ce pouvoir. Des histoires simples, et pourtant complexes en même temps, des vies vécues.

Profanes a cette magie. Cinq vies, qui comme beaucoup, ont côtoyé la mort, à un moment ou à un autre, cinq vies qui se rassemblent par le choix de l’une d’elle, cinq vies qui trouvent refuge dans une grande maison au jardin merveilleux, où se tissent des liens invisibles et puissants qui vont aidé chacun à se réconcilier avec sa vie, avec les morts qui la jalonnent…

Un vrai coup de cœur, lisez-le !

La Déesse des petites victoires

la DéesseYannick Grannec

 

« Si les gens ne croient pas que les mathématiques sont simples, c’est uniquement parce qu’ils ne réalisent pas à quel point la vie est compliquée »

John von Neumann

mathématicien et physicien

Histoires croisées de deux femmes, côtoyant, aimant et supportant des hommes à l’intelligence mathématique. Echange de souvenirs, de ses petits moments de vie qui finalement sont la base tangible de ces « génies » qui sans ces femmes aimantes à leurs côtés, n’aurait pu accomplir leurs travaux.

Récit en filigrane de la vie de Kurt Göbel, mathématicien du XX° siècle, peu connu des profanes, et qui ne savait pas vivre, terrorisé par le monde de ces semblables, paranoïaque et inadapté aux relations sociales. Récit surtout de sa femme Adèle, qui ne savait qu’aimer, et qui porta toute sa vie le corps de ce génie fragile… Récit aussi d’Anna, jeune femme effacée par une mère omnipotente et un amour finalement semblable à celui d’Adèle mais qu’elle fuit pour se protéger. Tous ces récits croisés sur fond de ce XX° siècle fascinant et terrifiant à la fois, qui vit la découverte de l’énergie atomique et les ravages d’Hitler.

Ce roman, formidablement écrit et documenté, est une ode au génie humain mais surtout à l’amour sans qui il ne serait rien…

« Tout ce que j’aurai fait pour lui dans ma vie. Ranger le monde pour empêcher cette maudite entropie de l’engloutir. Toutes les femmes ont-elles le même destin ? S’appareiller, par amour ou par besoin de sécurité, pour finir par tenir à bout de bras celui qui était censé être le rocher. Est-ce notre lot à toutes ? Ces frères, ces pères, ces amants, amis, sommes-nous là pour les repêcher ? Est-ce dans ce but loufoque que Dieu nous a donné des seins ou des hanches ? Sommes-nous seulement des bouées ? Que nous reste-t-il après, quand il n’y a plus personne à sauver ?

Ranger les souvenirs. »

Pour la beauté du texte…

Hier, sortie en famille : théâtre. Une fois n’est pas coutume, il a fallu motiver ! Un argument de poids cependant pour y arriver, une valeur sure : Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand…

Quelques surprises cependant sur cette mise en scène de Dominique Pitoiset, sur ce Cyrano interprété par Thierry Torreton.

Cyrano

Pourquoi cette grande salle blanche pavée dont les néons aveuglent, ces tables et tabourets métalliques, ce juke-box, cet évier, ce placard à balai et ce fauteuil d’hôpital ? Pourquoi cette bande d’hurluberlus, en pyjamas, pieds nus, bourrés de tics ? Pas forcément le genre de décor que l’on imagine pour ce poème de cap et d’épée… Doit-on déduire que Cyrano n’est qu’un fou parmi les fous ? Mort dans son fauteuil avant même le début de la pièce, alors que le public intrigué se demande s’il est bien réel…

Mais finalement qu’importe ! Au fur et à mesure que les mots se placent, on se laisse prendre par la magie, tant ce texte intemporel caresse nos oreilles et on en vient à oublier ce drôle de décor qui finalement donne encore plus de force à ces tirades inoubliables, celle du nez d’abord, celle du baiser ensuite et puis celle de la chronique hebdomadaire de monsieur Hercule Savinien Cyrano de Bergerac se terminant sur son dernier souffle…

http://www.mc2grenoble.fr/mc2_programme_reservation/zoom.php?spec=1614

Un peu de bois et d’acier

CHABOUTE

ChaboutéEt énormément de poésie ! Entourée de bédéphile, le moins que l’on puisse dire est que je ne suis pas une grande lectrice de ce genre d’ouvrage… Et pourtant, il arrive que l’on y fasse des rencontres hors du commun. Dans ce monde de bulle, j’ai eu un vrai coup de foudre pour cet auteur qui n’en met aucune !

A l’aide de son crayon et de sa plume, il révèle par une succession de dessin, simple en apparence, un panel d’émotion incroyable. Un peu de bois et d’acier, c’est l’histoire d’un banc public, où tout un chacun peut venir faire une pause, depuis les deux adolescents venus graver leur amour dans le bois jusqu’à cette dame qui lit, de ce couple âgé qui jour après jour vient y partager un gâteau au jeune garçon qui s’en sert de rampe de skate… Chacun l’utilise à sa manière, son rythme, selon ses besoins, du policier qui le surveille jusqu’à l’employé municipal qui l’entretien avec délicatesse.

Un lieu de rencontre, « un répit, un instant, une pause…un abri, un havre, un refuge…une scène…un carrefour…juste un peu de bois et d’acier » comme le décrit l’éditeur. Un réceptacle d’histoires et de sentiments, un lieu de mémoire auquel on s’attache jusqu’à le racheter à un brocanteur !

Histoire simple sans parole, qui sollicite notre imagination et nous laisse finalement attaché et ému par un peu de bois et d’acier !

Le cœur cousu

de carole Martinez

 

Certains livres se méritent. Leur lecture demande une certaine patience. Ils imposent un rythme, une progression pas à pas, tellement l’intensité du récit est forte. Ce roman, où le merveilleux prend souvent le pas sur la réalité, en fait parti.

Ce conte, entre magie et sorcellerie, entre vie et mort, entre lumière et ténèbres, entre Dieu et le Diable, entre richesse et pauvreté, est fait de contrastes… La mesquinerie et la jalousie y ont leur place, l’amour et la générosité aussi, la folie avant tout.

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Ce que je sais de Vera Candida…

de Véronique OVALDE.

Pas plus que ce qu’en révèle ce livre d’une écriture envoutante !

On imagine une île au large de l’Amérique du sud, un port de l’autre côté… Des paysages à peine décrit et pourtant des images qui s’imposent. Des femmes, mères et filles, n’ayant pas choisi ces maternités et pourtant tellement aimantes et attachées à leur progéniture. Des destins d’héroïnes dans des vies simples, où liberté et mélancolie se mêlent, ou l’amour arrive enfin quand Vera Candida brise la fatalité et fuit l’île…

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Journal d’un corps

de Daniel Pennac

Comment résister à la sortie d’un « Pennac » ? Président du jury lorsque j’ai été jurée du livre Inter, j’ai une tendresse particulière pour cet auteur dont j’ai lu tous les livres… Souvent léger et distrayant, parfois rempli de vérité, aucun ne m’a séduit comme ce dernier…

Quelle prouesse que ce livre ! Le journal qu’un homme tient de son corps, de 12 ans et quelques, à 87 ans, heure de son agonie. Cadeau posthume à sa fille adorée, où il lui transmet toute son humanité, toutes les surprises que lui a procuré son corps, tous les défis qu’ils se sont mutuellement lancés.

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City

d’Alessandro Barricco

J’ai emprunté ce livre parce que son titre m’a attirée… City… promesse d’un livre urbain ? J’ai parcouru la quatrième de couverture (qui en fait se situe à l’intérieur du livre…) et la description que fait l’auteur de son ouvrage dans lequel il précise avoir voyagé pendant trois ans m’a conforté dans cette envie !

J’ai aimé ce livre fait d’impasses, de petites ruelles et d’avenues, j’ai aimé ces histoires parallèles qui font des quartiers de plus en plus attachants au fur et à mesure que l’on s’y promène. Ville complexe aux histoires parallèles, typées, aux personnages complexes mais sympathiques, ville labyrinthique où on ne comprend pas tout, où on se perd pour mieux se retrouver…

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Les Oliviers de Négus

de Laurent Gaudé

Il m’arrive parfois de débuter un roman, impatiente de retrouver un auteur, comme un rendez-vous avec un vieil ami. Ils ne sont pas si nombreux à me garder fidèle, le plus ancien étant, sans aucun doute, mon « ami » d’outre-atlantique Paul Auster, avec qui chaque rendez-vous est un nouveau voyage dans son univers américain, mais surtout new-yorkais.

Il n’est pas seul heureusement et depuis quelques années chaque rendez vous avec Laurent Gaudé fut un plaisir, du « Soleil des Scorta » en passant par « Eldorado » jusqu’à « la Porte des Enfers ». Même si les sujets lus étaient de plus en plus sombres, je ne m’attendais pas, en ouvrant « les Oliviers de Négus », à tant de noirceur.

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