De B à W… Récit d’une participation au Livre Inter
17 octobre 2013 Laisser un commentaire
On m’a souvent demandé comment j’avais réalisé ce rêve d’être juré au Livre Inter… Voici donc le récit d’une aventure encore très présente aujourd’hui !
D’abord,
Il faut oser. Se dire qu’après tout on a une chance, que l’on peut devenir l’un des vingt-quatre sélectionnés. Que ce rêve plusieurs fois fait de participer au Livre Inter peut devenir réalité. Avoir la faveur de lire dix romans à la suite, le devoir de défendre sincèrement ceux qui vous auront plu, de critiquer les autres, le droit de vivre ces instants que vous imaginez magiques, sans trop réaliser vraiment ce qu’ils peuvent être.
Ensuite,
Il faut écrire… prendre sa plus belle plume et livrer une partie de soi, avec sincérité, honnêteté, parler de cette passion qui vous tient : la lecture… Difficile de savoir ce qui fera pencher la balance de votre côté, ce qui vous démarquera.
Puis,
Il faut aller jusqu’au bout de la démarche et envoyer cette missive. Cette étape semble la plus facile… Mais peser l’enveloppe, la timbrer et la glisser dans une boite aux lettres peut devenir un effort surhumain quand on évalue le poids de la déception si on est écarté… Et puis le faible espoir qui vous habite finit par prendre le dessus… « Advienne que pourra ! »
Après,
Il faut attendre, sans vraiment savoir combien de temps. Un jour vous allumez la radio, plus ou moins par hasard, comme tous les jours ou presque, et commence alors l’énumération des jurés du Livre Inter : douze femmes, douze hommes. Après une litanie qui vous parait interminable, vous commencez à ne plus y croire… quand votre nom, votre âge, votre ville, votre profession sont annoncés… Les hasards de l’ordre alphabétique ont fait que vous étiez la dernière. Vous avez du mal à y croire, pensez avoir rêvé… Heureusement, vous n’étiez pas la seule à écouter, on vous appelle pour vous féliciter, vous commencez à réaliser !
Alors,
Se succède une série d’événements plus excitants les uns que les autres. La première lettre arrive, confirme votre participation à ce livre inter, et vous permet d’affirmer que ni vous ni vos amis n’ont rêvé. Puis le premier paquet, et le second, vous apportent sur un plateau de la lecture nouvelle pour quelques semaines. Cet instant euphorique qui vous met face à dix romans tout neufs, dix livres qui désormais vous appartiennent, que vous allez lire comme bon vous semble, à votre rythme et sans véritable contrainte, juste une date butoir ! Je me suis retrouvée face à la pile, excitée et enthousiaste, caressant les couvertures, soupesant les ouvrages… Dix LIVRES, dix objets merveilleux, promesses de voyage, quelques centaines de pages à caresser du regard et des mains : la couverture, la qualité du papier, les mots imprimés, ce rapport presque sensuel que l’on peut avoir avec un livre. Ce compagnon fidèle que l’on peut avoir sur soi, dans une poche, que l’on peut ouvrir n’importe où pour alors se retrouver ailleurs. Par lequel commencer ? Du moins épais au plus lourd ? Du plus volumineux au plus léger ? Au hasard ? Que faire ?… Alors arbitrairement je les ai lus du B au W, dans l’ordre alphabétique des auteurs. Pas de regrets, les livres se sont enchaînés sans heurt, pour se terminer en feu d’artifice !
J’ai passé des moments uniques en compagnie de ces dix auteurs, même si certaines promesses ne furent pas tenues. J’avais espéré au contact de certaines couvertures, à la lecture de certains titres, des échappées, des voyages, des lectures qui n’ont pas eu lieu. Mais d’autant plus que certains jurés les ont défendus avec cœur et arguments, je ne peux en éliminer aucun, même si certains m’ont laissé un goût amer. Ils forment tous les dix une équipe dont La maladie de Sachs fut le leader pour la majorité de notre jury.
Hasard,
Notre lauréat fut ma dernière lecture, appréhendée avec un peu de panique devant les cinq cent pages, perdue dans les premiers chapitres, absorbée par la suite, avalée en deux jours… Une banale histoire de médecin de campagne, des patients aux pathologies courantes, une pudique et discrète histoire d’amour, la vie… Mais dans un roman de qualité, écrit et composé avec cœur, issu d’une grande âme. Quelle leçon d’humanité, d’humilité et de douceur. A tel point qu’il devrait être au programme de toutes les universités, y compris celle de médecine. Bref, un de ces rares romans que l’on voudrait pouvoir offrir sans compter, qui vous donne des envies de larcins quand les finances ne suivent plus, que l’on voudrait diffuser tout azimut mais que je ne peux me résoudre à prêter de peur de le perdre. Un roman qui vous accompagne chaque jour, auquel vous repensez souvent, au gout de pas assez…
Enfin,
Je ne pourrais terminer sans parler de ce voyage à Paris, de ces retrouvailles, car même si nous ne nous connaissions pas, nous nous sommes tout de suite reconnus, avons tout de suite entamé des discussions passionnées sur nos lectures ! Et aussi de ces voix devenues visages, ces compagnons de tous les jours que je ne peux plus entendre sans revivre tout cet épisode. Toutes ces personnes qui nous ont accueillis avec tellement de gentillesse, simplement mais comme si nous étions importants… Et nous l’étions, à notre manière, remplissant notre rôle avec sérieux, enthousiasme, timidité parfois mais toujours avec cœur.
Dirigée par Daniel Pennac, la tâche a été accomplie par notre équipe, car nous formions une formidable équipe, comme je les aime, panachée, diversifiée : vingt-cinq personnes passionnées de lecture, mais avec chacune ses raisons propres, son parcours bien à elle, ses bonheurs et ses difficultés, sa vie quoi ! Quel joie de partager des sentiments à propos d’un même livre, quel cadeau d’avoir eu ces discussions passionnées, ces opinions communes, ces idées opposées défendues avec courage. Lire et pouvoir dialoguer, donner son avis et s’enrichir de la lecture des autres, donner envie de lire à d’autres… tel est le merveilleux but, atteint pour nous, par le Livre Inter.