Mémorial de la Déportation, Paris, Ile de la Cité
1 mars 2012 Un commentaire
J’ai un jour eu connaissance de ce lieu caché… Et soudain il m’est apparu urgent de le découvrir, au plus vite. J’ai gagné l’Ile de la Cité, cœur de Paris cerné par la Seine, j’ai longé Notre-Dame, rapidement, comme aspirée, mon regard dirigé vers cette pointe mystérieuse, essayant d’apercevoir un signe annonciateur… Mais rien.
J’ai alors atteint la grille du square de l’île de France et, tout à coup, toute précipitation a disparu. Les quatre chiffres, un, neuf, quatre, cinq, m’ont sauté aux yeux comme une sorte d’avertissement, de rappel. J’ai alors doucement tiré la grille et suis entrée dans ce petit jardin où le calme régnait déjà. Ce silence, cette pierre blanche sous le soleil…. J’ai jeté un dernier regard sur Paris avant de m’enfoncer dans cet espace indicible, fait de murs nus, d’ouvertures vers le ciel et vers l’eau, d’une crypte…
Deux escaliers… Hésitation…
J’ai finalement choisi celui de droite, je l’ai descendu, comme on franchit un seuil interdit, lentement, précautionneusement, regardant à droite puis à gauche, pour ne voir que ces hauts murs un peu oppressants… sans regarder derrière, mais fixant cette plage de soleil en contrebas… Etroit et raide, il m’a fait réaliser que j’entrais dans un autre monde, à la dimension temporelle différente, le monde du souvenir, des morts. Tout a disparu, laissant place à cet espace replié sur lui-même, fait d’eau et de ciel, parvis ambigu, à la fois ouvert et fermé.
J’ai fait les quelques pas qui me séparaient de la herse, sculpture d’acier, aux formes acérées, rappelant les clôtures des camps, quelque peu menaçante, surtout pour qui passe au-dessous. La Seine, sentant mon hésitation, m’adresse un signe rassurant au travers de la lourde grille. Elle est là, avec son bruit familier… seule réalité me rattachant encore à Paris. Je me suis enfin retournée pour apercevoir l’interstice par lequel on pénètre vraiment, pris dans l’enclave de ces deux blocs suspendus comme par miracle.
Arrivée à la frontière de l’ombre et de la lumière, je me suis arrêtée… Comme si quelque chose, quelqu’un me guettait, m’attendait dans la pénombre. Une, deux, trois secondes… Je suis entrée. Tout de suite ce bruit de pas, ce sursaut, cette présence… Cette étrange présence de tous ces noms, cette ambiance pénétrante, ce calme et cette fraîcheur. L’appréhension effacée, quel merveilleux temps de pause passé à contempler ce couloir tapissé de barrettes d’or, alignées, bien rangées, représentatives de chacun d’entre eux, une lumière brillant au fond de cette galerie.
Itinéraire initiatique que cette visite au Mémorial de la Déportation, sans décor, massif et incroyablement propice au recueillement… Lieu d’une sobriété toute cistercienne qui, par la force et la discrétion de son expression, rend un émouvant hommage aux martyrs de la déportation.
J’ai eu du mal à quitter ce lieu, cette architecture créatrice de beauté et révélatrice de sentiment : respect, admiration, tristesse, colère, bonheur… étrange mélange.
Je suis restée longtemps assise en sa pointe à écouter la Seine le caresser, à savourer la douce brise traversant la lourde grille mystérieuse, à contempler ce trou sombre, évocateur de tant d’émotions encore si présentes… A profiter de ces quelques instants, me sentant à la fois ici et ailleurs.
Thank you for sharing thhis